par Seyfeddine Ben Mansour
L’Aïd al-Fitr, la fête qui clôt le mois d’abstinence et de dévotion qu’est le ramadan, sera célébré ce jeudi par l’ensemble des musulmans. Bon nombre d’entre eux s'acquitteront ce jour-là d’une aumône spécifique : la zakât al-fitr. Comme la zakât al-mâl (impôt annuel sur les revenus et les biens), il s’agit d’un impôt purificateur, conformément à l’étymologie du terme zakât. Contrairement à la zakât al-mâl, elle ne constitue pas un des cinq piliers de l’islam. Elle n’en est pas moins obligatoire et, bien que plus circonscrite dans le temps, la fonction sociale de la zakât al-fitr, comme sa fonction individuelle, n’en sont pas moins importantes. «L’Envoyé de Dieu a prescrit la zakât al-fitr à ceux qui auront accompli le jeûne, afin [d’une part] de les purifier de tout acte ou de tout propos indécent [qu’ils auraient accompli ou tenu durant le mois saint] et [d’autre part] de pourvoir aux besoins des nécessiteux [le jour de l’Aïd al-Fitr]» rapporte ainsi Ibn ‘Abbas dans un hadith authentique cité par Abou Dawoud (Sunan). Sur le plan individuel, la zakât al-fitr permet donc au croyant de se purifier de tout acte (écart de conduite) ou propos (grossier ou méchant) qui aurait pu entacher son jeûne. Les ulémas citent souvent à cet égard le verset 14 de la sourate LXXXVII : «Bienheureux l’homme au cœur exempt de toute souillure» ! Si le bénéfice est certain, l’accomplissement qui le rend possible est obligatoire.
Fêter l'Aïd dans la dignité
La zakât al-fitr est en effet une condition de validation des trente jours de jeûne qui l’ont précédée : «Le jeûne du mois de ramadan demeurera suspendu entre ciel et terre et ne sera point élevé vers Dieu tant que n’aura pas été acquittée l’aumône purificatrice de la rupture du jeûne [zakât al-fitr]», affirme ainsi un hadith. Sur le plan social, la zakât al-fitr, destinée prioritairement aux pauvres, assume une fonction de solidarité, resserrant le tissu social à l’occasion d’une fête islamique dont nul ne doit être exclu. Il s’agit en effet de permettre aux plus démunis de pouvoir, eux aussi, fêter l’Aïd al-Fitr : «Épargnez-leur la mendicité en ce jour [de fête] !», enjoint ainsi un hadith, suggérant qu’il est du droit des pauvres de pouvoir rester dignes en ce jour béni. La zakât al-fitr est due par tout croyant qui possède de la nourriture au-delà de ses besoins. Elle doit être en outre acquittée pour chacune des personnes à charge (enfants, parents âgés, adultes handicapés, etc.) de confession musulmane, ou non (selon les hanéfites et les chiites duodécimains). Si aujourd’hui, pour des raisons pratiques, de nombreux ulémas (malékites, notamment) se sont rangés à l’avis de leurs homologues hanéfites et chiites duodécimains qui, depuis plusieurs siècles déjà, permettent que la zakât al-fitr soit acquittée en argent, elle est à l’origine un don en nature. Il consiste en un sâ‘ de denrée alimentaires de base (le sâ‘ est une unité de mesure qui équivaut à quatre fois la quantité que l’on peut mettre dans ses mains rassemblées, soit environ 2 litres). Les hadiths citent essentiellement le blé, l’orge, les dattes et les raisins secs. Les bénéficiaires de cette aumône de rupture du jeûne sont, comme il est attendu, des musulmans. Néanmoins, pour des faqîh de renom tels que az-Zouhri, Abou Hanifa, ou Ibn Shibrima, ce n’est pas là une obligation. Ils rappellent à cet égard que «Dieu ne vous défend pas d’être bons et équitables envers ceux qui ne vous attaquent pas à cause de votre religion et qui ne vous expulsent pas de vos foyers. Dieu aime ceux qui sont équitables» (Coran, LX : 8).
Article publié sur Zaman France (06 auôt 2013).
Mots clés : Abou Dawoud, zakât al-fitr, Aïd al-Fitr, purification, validation, jeune, solidarité, nécessiteux, aumône, Islam des mondes.
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