mercredi 16 juillet 2014

Hassan al-Banna, fondateur des Frères musulmans

par Seyfeddine Ben Mansour

En Egypte, le pouvoir militaire issu du coup d’Etat a décidé de dissoudre les Frères musulmans en tant qu'organisation non gouvernementale. Cette information, rapportée le 6 septembre dernier par le journal officiel Al-Akhbar n’est pas sans rappeler le précédent du 8 décembre 1948 : la dissolution de la confrérie ordonnée par un pouvoir également non élu, dans une Egypte sous domination étrangère. Hassan al-Banna, le fondateur des Frères musulmans, mourra assassiné deux mois plus tard, le 12 février 1949. Sa mort, décidée par le roi Farouk Ier, débarrassait le colonisateur britannique d’un idéologue, d’un prédicateur et d’un homme d’action qui nuisait à ses intérêts dans la région. Le fondateur et Guide suprême des Frères musulmans est né en 1906 à Mahmudiyya, non loin d’Alexandrie. Son père, Ahmad al-Banna, aura une grande influence dans la formation du jeune Hassan. Cet horloger de profession était en effet un savant en sciences islamiques traditionnelles à l’origine d’une édition critique du Musnad de l’imam Ibn Hanbal. La première éducation de Hassan sera celle, de type ancien, des fils d’ulémas : étude du Coran par cœur, du hadith, du fiqh et de la langue arabe. En 1923, il est admis dans la fort moderne Dar al-Ulum (Ecole normale) du Caire. Il en est diplômé trois ans plus tard et débute à l’âge de 20 ans sa carrière d’instituteur, métier qu’il a choisi par vocation, ayant refusé le cursus universitaire classique d’Al Azhar, aussi bien qu’une bourse du gouvernement égyptien pour aller étudier en Europe.
 
Les débuts des Frères musulmans

A Dar al-Ulum, il développe sa thèse selon laquelle le seul remède au mal dont souffre la société musulmane réside dans le retour aux sources vives du Coran et de la Tradition (des dits et actes du Prophète). C’est dans ce cadre estudiantin qu’il commencera avec quelques camarades à prêcher dans les divers lieux de réunion qu’offrait la capitale, et notamment les mosquées et les cafés. En 1928, alors qu’il est en poste à Ismaïliyya, il fonde l’association des Frères musulmans. Son but : réveiller de sa léthargie le sentiment religieux de ses compatriotes et lutter contre les anciennes superstitions, comme contre toutes sortes de pratiques déviantes nées d’une modernité corruptrice. D’un réseau d’action socio-culturelle (écoles de garçons et de filles, instituts, universités, hôpitaux, mosquées, etc.), la confrérie évoluera vers la création d’un véritable secteur économique (tissu d’entreprises) auquel succédera l’émergence d’une organisation politique moderne, d’abord de contestation et de pression, puis, très récemment, de gouvernement. «A nous l’action, à Dieu le succès, a dit Hassan al-Banna dans un de ses discours fondateurs en date de 1928, notre groupement sera d’abord et fondamentalement une idée, une idée avec toutes ses implications et toutes les actions qui en découlent. Nous sommes des frères au service de l’Islam, nous sommes les Frères musulmans.»

 
Dans la lignée des premiers réformateurs musulmans

Si le pragmatisme des Frères musulmans et leur important investissement du champ tant associatif que politique peut aujourd’hui faire écran, il n’en demeure pas moins que Hassan al-Banna se situe dans une lignée qui remonte aux premiers réformateurs musulmans de la fin du XIXe siècle, dont les œuvres ont constitué de véritables laboratoires de la modernisation de l’islam : Jamal ad-Din al-Afghani, pionnier du mouvement panislamique, Muhammad Abdou, tenant de la théorie des deux livres, « l’un créé, qui est le livre de la Nature, et l’autre révélé, qui est le Coran », mais aussi Said Nursi, Abd al-Hamid Ibn Badis et Muhammad Iqbal. Tous ont en commun d’avoir allié à l’idéal d’un retour aux sources du Coran et de la Tradition le pragmatisme du réformateur social conscient des enjeux de son temps.


Article publié sur Zaman France (20 septembre 2013).

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