par Seyfeddine Ben Mansour
De Constantinople à Istanbul
Il y a 560 ans, le 29 mai 1453, Constantinople tombait. Une date
charnière dans l’histoire de la chrétienté, mais aussi une grande date
dans l’histoire de l’Islam, et plus généralement dans celle de
l’humanité : la chute de Constantinople, ‒ devenue Istanbul, capitale
conquérante d’un nouvel empire sous la bannière de l’islam ‒, marque la
fin du Moyen-Age et le début des Temps modernes. Au XVe siècle, l’Etat ottoman avait déjà commencé son expansion vers l’Europe. Sous Bajazet Ier (1360-1389), la Thrace, la Bulgarie, la Serbie et la Hongrie avaient été colonisées. Constantinople était donc, au XIVe siècle
déjà, prise en tenaille, sans guère de recours face à la vitalité du
jeune Etat ottoman. La vénérable cité, malgré son aura mystique, était
faible : derrière le prestige du nom de Byzance, il y avait la réalité
d’une ville vassale des Ottomans. Elle ne devra du reste son salut, ‒ en
réalité, un court répit ‒, qu’à Tamerlan. L’invasion de l’Anatolie par
les Mongols en 1399 mettra en effet un frein à l’avance ottomane.
Mehmed II, le conquérant
C’est au jeune Mehmed II, 21 ans, qu’il appartiendra de réaliser le
rêve de ses ancêtres : conquérir Constantinople et effacer
définitivement Byzance de la carte de l’Asie. Face à Anadolu Hisar, la
forteresse posée sur la rive asiatique du Bosphore par son grand-père
Bajazet Ier, le jeune
sultan fit ériger Rumeli Hisar, son pendant sur la rive européenne. A
Edirne, il mit en chantier une arme nouvelle, un canon de très grande
puissance, tandis que 12.000 hommes et 350 navires étaient sur le pied
de guerre, prêts à manœuvrer. Le cri de détresse lancé par l’empereur
Constantin XI Paléologue à l’Europe catholique aboutira à l’envoi de 700
soldats ; une force dérisoire. Peu avant l’assaut, Mehmed II offrira au
Basileus une capitulation honorable : le souverain aura la
dignité de la refuser. Il mourra les armes à la main lorsque, le canon
ayant fait une brèche dans la muraille, les soldats turcs
s’engouffrèrent dans la ville. C’était un mardi. Sur son cheval blanc,
Mehmed II, désormais paré du surnom de Fatih, «Conquérant», se dirige
vers la basilique Sainte-Sophie, dans laquelle il entre sans mettre pied
à terre, et décide sur le champ de la transformer en mosquée.
Grande tolérance pour les non-musulmans
Trois jours plus tard, le 1er juin,
celle qui allait devenir Ayasofya, la mosquée-cathédrale symbole
d’Istanbul, abritera sa première prière collective du vendredi. Mehmed
II venait de réaliser la prédiction du Prophète : «Constantinople sera
conquise. Béni soit le commandant qui la conquerra et bénies soient ses
troupes !» (Ibn Hanbal, Musnad, IV : 335). Le sultan voudra
ainsi faire de l’ancienne Constantinople une ville sainte de l’islam :
il fait élever un mausolée et une mosquée à l’endroit où sont retrouvés
les restes d’Abou Ayyoub al-Ansari, un compagnon du Prophète, mort en
martyr lors d’une première attaque de la ville par les armées musulmanes
au VIIe siècle. La date du 1er juin
correspond également à la fin de la période légale de pillage (3
jours), pillage durant lequel les habitants auront été relativement
épargnés. En vertu de leur statut nouveau, la protection de leur
personne et de leurs biens devient une obligation. Si la ville
s’islamise, les non-musulmans pratiquent librement leur religion et sont
organisés en communautés, avec leurs lois et leurs tribunaux propres.
Les patriarches arméniens, syriaques, grecs, ainsi que le grand rabbin
de la ville sont nommés par Mehmed II. Grand conquérant et
administrateur brillant, il accordera de grands privilèges aux
chrétiens, notamment Génois, contribuant ainsi à la prospérité et au
rayonnement de la ville.
Mots clés : Byzance, Constantinople, Istanbul, mehmed II, Constantin, paleologue, 29 mai 1453, Bajazet Ier, Islam des mondes.
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