par Seyfeddine Ben Mansour
Jean-François
Copé, président proclamé de l’UMP, a appelé le 12 décembre dernier à
une «trêve des confiseurs». Même son de cloche chez son rival François
Fillon qui la veille sur Europe 1 lançait un «Ça suffit !». Les deux
hommes sont néanmoins tombés d’accord sur le principe d’un nouveau vote
des militants qui devrait assurer au vainqueur une légitimité au-dessus
de toute contestation. Même ton conciliant et même désir de pouvoir en
Egypte où le président Morsi a annoncé dans la nuit du 8 au 9
l’annulation du décret constitutionnel du 22 novembre par lequel il
s’arrogeait des pouvoirs exceptionnels. Le référendum sur le projet de
Constitution qui a eu lieu le 15 décembre devrait contribuer à légitimer
le président Morsi, fortement contesté ces dernières semaines. En
islam, le pouvoir est une responsabilité valorisée en tant que telle dès
lors qu’elle s’accompagne de compétence, d’humilité et de sens de
l’équité. Le désir de pouvoir, en revanche, est fortement condamné. Il
relève de l’orgueil et, plus généralement, des vices qui nient le
principe d’égalité. Les hadiths sont à cet égard sans équivoque. «Vous
désirez ardemment le pouvoir. Ce sera là cependant une cause de regret
au jour de la Résurrection. Quel heureux début, mais quelle fin terrible
!», a dit ainsi le Prophète (d’après al-Boukhari). Ce désir de pouvoir
se traduit notamment, sur le plan pragmatique, par l’accaparement de la
parole : le pouvoir est pouvoir de dire, et singulièrement, de se faire
écouter par ceux qui n’en disposent pas. D’où cet autre hadith, rapporté
par at-Tabarani : «Evitez les chaires !» Le goût pour les étiquettes,
protocoles et autres usages destinés à marquer la préséance du chef,
autre aspect formel, visible, du désir de pouvoir, sont, par voie de
conséquence, condamnés. «Celui qui aime voir les serviteurs de Dieu se
lever pour lui, qu’il se choisisse une demeure en Enfer», dit ainsi un
hadith rapporté par al-Boukhari.
Condition du pouvoir : une moralité irréprochable
Ces qualités morales qui doivent être celles du responsable politique
en islam sont une partie d’un tout ; elles relèvent de la conception
même du pouvoir politique telle qu’elle s’est initialement constituée à
la mort du Prophète. Cette conception dessine un système politique
contractuel, qui prendra la forme d’un régime califal polycratique, où
la légitimité est, entre autres, le fruit d’une élection (au sens large
de «choix»), et où l’élection elle-même est liée aux qualités morales du
candidat. La légitimité des quatre premiers califes, dit «bien-guidés»
(al-khulafâ ar-râshidûn), dont la moralité devait être au-dessus de
tout soupçon, s’articulait ainsi autour de quatre axes : la
concertation, le libre choix, la libre candidature et le serment
d’allégeance. La succession du deuxième calife Omar se déroula en deux
temps : premièrement, la désignation d’un collège en vue de sélectionner
les candidats, et, deuxièmement, l’élection. Quant à la succession du
troisième calife, elle fut organisée par une concertation libre entre
les six prétendants, choisis par la communauté pour leur mérite. Aucun
d’entre eux, en effet, ne l’avait réclamé. Abou Moussa al-Ash’ari
rapporte à cet égard un hadith significatif : «Un jour que j’étais chez
le Prophète avec deux de mes cousins, l’un d’eux dit : "O Envoyé de Dieu
! accorde-nous le commandement de certaines des régions que Dieu
l’Exalté t’a confiées !"L’autre fit aussi la même demande. Ce à quoi
l’Envoyé de Dieu répondit : "Par Dieu, nous ne confions jamais le
pouvoir ni à celui qui le réclame, ni à celui qui le convoite."»
Article publié sur Zaman France (22 décembre 2012).
Mots clés : Islam, Politique, pouvoir politique, Islamisme, calife, Omar, Prophète, al-khulafâ ar-râshidûn, Mohamed Morsi, Jean François Cope, Islam des mondes.
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