lundi 14 juillet 2014

Arts de L’Islam : synthèse islamique des arts d’Orient

par Seyfeddine Ben Mansour

Le 22 septembre dernier ouvrait le huitième département du Louvre, consacré aux arts de l’Islam. Sous une verrière ondulante due aux architectes Bellini et Ricciotti, le nouveau département s’étend sur 3.000 m2 et abrite quelques 19.000 objets répartis sur deux étages dans la cour Visconti. Musée universel par excellence, le Louvre est pour les arts d’Islam un écrin idéal, l’un des rares à même de rendre compte de leur universalité, aussi bien en tant que produits d’une culture qui a porté le flambeau de la civilisation humaine, qu’en tant que produits d’une civilisation qui s’est étendue sur la quasi-totalité du monde connu. S’il existe en effet une esthétique propre appelée «arts de l’Islam», qui relève tant du domaine religieux que du domaine profane, elle se décline en une variété de formes et de techniques depuis le Portugal jusqu’au Turkestan chinois. L’unité de cette esthétique relève en dernière analyse de l’interdit relatif de la représentation en islam, qui a favorisé le développement de la calligraphie et des motifs ornementaux, géométriques ou floraux. La représentation figurée des hommes et des animaux, si elle est loin de constituer la norme dans le domaine profane, est simplement proscrite dans le domaine religieux (ainsi l’enluminure coranique et la décoration des mosquées). Aussi, si l’art de la miniature a pu se développer, dans l’aire persane notamment, il n’existe pas à proprement parler d’art pictural d’Islam. La typologie des arts d’Islam comprend essentiellement l’architecture, les arts du livre et les arts mobiliers, l’art de la calligraphie traversant ces trois catégories. Papier, céramique, ivoire, bois, cuir, textile, verre, cristal, métaux, pierres précieuses, marbre, pierre, brique et stuc, le génie des artistes et artisans musulmans se sera exprimé à travers une très grande variété de supports. Trait caractéristique des grandes civilisations, ce génie tout islamique est historiquement un creuset dans lequel se sont fondus les savoirs, les techniques et les esthétiques des peuples qui ont embrassé l’islam. Ainsi le dôme du Rocher à Jérusalem (660), dû à des Syriens byzantins, est-il la reproduction avec un décor floral et calligraphique spécifique de la cathédrale de Bosra (plan octogonal central avec coupole). Le transfert du califat de Damas à Bagdad au milieu du VIIIe siècle marquera le début d’une forte influence de l’art iranien, notamment dans l’architecture avec l’utilisation de la brique. Mais également dans le travail du bronze, du verre et surtout des céramiques, dont les célèbres céramiques à reflets métalliques, que l’on retrouvera très vite dans l’Occident musulman (mirhab de la Grande mosquée de Kairouan, 670), qui en développera la technique des siècles durant : bien que très marqué par la faïence flamande, l’azulejo portugais en est aujourd’hui l’héritier direct. Si l’art du tissu est pour une large part le fait des Egyptiens, celui du tapis est essentiellement celui de l’aire turco-iranienne, et spécialement de l’Anatolie. Ainsi soumis du milieu du VIIe à la fin du IXe siècle aux influences des peuples devenus musulmans, c’est entre le Xe et le XIIe siècle qu’il prendra conscience de lui-même, brillant d’un éclat sans pareil dans les trois siècles suivants (XIIIe-XVe siècle). Il connaîtra un rebondissement au XVIe siècle sous l’impulsion de l’architecte ottoman Sinan. L’avènement à la même époque en Inde d’une dynastie turco-mongole de culture persane, les Moghols, sera également à l’origine d’un des chefs-d’œuvre de l’art d’islam : le célèbre Taj Mahal, qui unira à l’élégance persane, la somptuosité indoue.

Article publié sur Zaman France (05 octobre 2012).

Mots clés : Islam des mondes.

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