par Seyfeddine Ben Mansour
Bien que partiellement inachevée, la mosquée de Strasbourg a ouvert
ses portes le lundi 1er août, premier jour du mois de ramadan.
Elle
sera pourvue d’un minaret, élément architectural qui avait été rayé des
plans durant la mandature UMP du tandem Fabienne Keller-Robert
Grossmann. L’adjoint au maire chargé des cultes, le socialiste Olivier
Bitz, ne voit pour sa part aucune raison de s’y opposer, dans la mesure
où ce minaret, purement symbolique, ne diffusera pas d’appel à la
prière. C’est du reste le cas de l’ensemble des mosquées à minaret de
France, à l’exception de la lointaine mosquée Noor-e-Islam de
Saint-Denis de la Réunion, dont les haut-parleurs ne sont toutefois
utilisés que le vendredi. En métropole, où la présence de l’islam dans
l’espace public est loin d’être unanimement acceptée, la future mosquée
de Marseille se contentera d’émettre un faisceau lumineux en guise
d’appel à la prière. Son minaret aura 25 mètres de haut, soit environ le
double de ce qui semble être devenu la norme dans l’hexagone. Du temps
du Prophète, le minaret n’existait pas. On sait par ailleurs que le
premier muezzin de l’histoire de l’islam, Bilâl Ibn Rabâh al-Habashî,
faisait son appel depuis le toit de la mosquée de Qubâ’ à Médine. Celle
fondée en l’an 21 de l’Hégire (643) par ‘Amr Ibn al-‘Âs, compagnon du
Prophète, ne comportait ni minaret, ni mihrâb en forme de niche, ni même
de chaire (minbar). Cet état de fait est caractéristique de l’islam
primitif, encore circonscrit au territoire de la péninsule arabique.
Cependant, l’Etat islamique naissant connaîtra une extension fulgurante,
intégrant en moins d’un siècle un grand nombre de cités autrefois
perses ou byzantines. Ce milieu urbain rend nécessaire la création de
tours depuis lesquelles faire parvenir au plus grand nombre l’appel à la
prière. A cette fonction première, essentielle, s’en ajouteront
d’autres. Les minarets servent en effet à la proclamation des édits du
souverain et, illuminés à leur sommet, de repère pour le voyageur
nocturne. Cette dernière fonction explique l’étymologie du mot « minaret
», qui dérive de l’arabe manâra, « phare », par le biais du turc menar.
L’origine de cet élément architectural remonte à l’époque omeyyade
(VIIe-VIIIe siècles), dans la Syrie autrefois byzantine : les premiers
minarets dérivent de fait des tours des églises syriennes. Raison pour
laquelle le minaret primitif s’élève sur une base carrée. Ce type
ancien, encore largement usité dans la Syrie actuelle, a été adopté dès
le VIIIe siècle à l’autre bout du monde musulman, en Espagne et au
Maghreb, où il est devenu la norme. La Giralda de la cathédrale de
Séville (ancien minaret de la mosquée de Ishbîlya) est construite sur ce
modèle. Sous les Abbassides (VIIIe-XIIIe siècles), naîtront des types
nouveaux : circulaire, en spirale ou octogonal. Différents types peuvent
être associés, à l’instar de la mosquée Ibn Tûlûn au Caire dont la base
est carrée, le second niveau, circulaire et le dernier, octogonal.
L’époque fatimide (Xe-XIIe siècles) verra les minarets ornés à leur
extrémité d’un bulbe élégant et discret, comme en témoigne la mosquée Al
Azhar du Caire. Sous les dynasties turco-afghanes de Delhi (XIIe-XVe
siècles), les minarets deviendront particulièrement imposants :
cylindriques, crénelés, ceux de la mosquée Quwwat al-Islâm à Delhi
(1192) se dressent sur une base très large et vont rétrécissant. Mais
c’est à l’architecte ottoman Sinan (1489-1588) que l’on doit sans doute
les minarets les plus élégants de l’architecture islamique :
cylindriques, long et fins, surmontés de cônes effilés, ils flanquent au
nombre de deux, quatre ou six l’immense dôme d’une mosquée sans
piliers.

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