par Seyfeddine Ben Mansour
Une
bombe a explosé peu après minuit devant l’église des Saints
(Al-Qiddisîn) d’Alexandrie, faisant 21 morts et 79 blessés parmi les
fidèles réunis pour la messe du Nouvel An. Cet attentat est le plus
sanglant qu’aient connu les Coptes d’Égypte. Il s’inscrit dans la lignée
des attentats qui visent les chrétiens arabes depuis l’occupation de
l’Irak par l’armée américaine en 2003.
Il y a aujourd’hui dans le monde environ 30
millions d’Arabes chrétiens, soit un peu plus d’un Arabe sur dix. Près
de la moitié vivent en Occident (notamment dans les Amériques). La
communauté la plus importante est celle du Brésil (12 millions). Elle
est une fois et demie supérieure à celle des Coptes d’Égypte, la plus
importante communauté chrétienne du Moyen Orient (8 millions). Liban
excepté (30 %), la proportion des chrétiens est relativement faible dans
les pays de la région : 10 % dans le cas de l’Égypte, de la Syrie et
d’Israël, 3% en Irak, 2% en Palestine et en Jordanie.
L'Eglise des Arabes
S’il existe une église des Arabes, il n’existe pas
une Église qui s’appellerait l’Église arabe. Les Arabes chrétiens sont
catholiques romains, grecs orthodoxes, grecs catholiques melchites,
arméniens catholiques, syriaques catholiques, syriaques orthodoxes,
chaldéens, maronites et coptes.
La communauté arabe chrétienne est en effet riche
d’une histoire prestigieuse et d’un patrimoine ancestral. Elle est
l’héritière des premières communautés chrétiennes qui se sont
constituées autour des évêchés de Jérusalem, d’Antioche, d’Alexandrie et de Constantinople.
De là, le christianisme se diffusera progressivement sur tout le
territoire de l’actuel monde arabe, au sein d’une mosaïque de peuples
que par la suite l’islam unifiera. Au fil des siècles, la diffusion de
la langue arabe et de la culture arabo-musulmane créeront ce que, bien
plus tard, on nommera l’arabité.
Unis par l'Islam, les chrétient participent à son essor
Les chrétiens, arabes ou arabisés, vont d’ailleurs
puissamment contribuer à l’essor de la civilisation arabo-musulmane.
Majoritaires dans l’empire abbasside jusqu’au Xe
siècle encore, héritiers d’une longue tradition hellénique et syriaque,
ils seront traducteurs, médecins, philosophes, mathématiciens, mais
aussi brillants exégètes chrétien de langue arabe (Hunayn Ibn Ishâq,
Qustâ Ibn Lûqâ, Yahyà Ibn 'Adî, etc.).
Ils joueront aussi un róle de premier plan dans
l’architecture musulmane, dans l’art, les mosaïques, les textiles,
l’artisanat, etc., comme dans toutes les expressions de la vie sociale.
Les musulmans mettront deux siècles pour assimiler et dépasser cet
héritage helléno-syriaque auquel leur auront permis d’accéder ces
chrétiens de plus en plus Arabes.
Contrairement aux juifs arabophones, les chrétiens
en terre d’islam ne se reconnaissent aujourd’hui d’autre identité
qu’arabe. Par leur ouverture sur l’Occident et leur goût pour les
belles-lettres, ils contribueront ainsi d’une façon décisive à la
Renaissance littéraire et culturelle — la Nahda — de la «Nation arabe» à
la fin du XIXe siècle.
Un chrétien à l'origine du panarabisme
Cette notion même a été, dans une large mesure,
forgée par des intellectuels chrétiens, à l’instar de Michel Aflak
(1910-1989), fondateur syrien du parti socialiste Baas. L'arabité, qui, sous sa forme nationaliste,
sera jusqu’au milieu des années 70 le grand idéal des peuples arabes,
devait mener à la construction d'un État panarabe ayant comme références
la raison, le citoyen et la modernité…
La judaïsation inexorable de la Palestine, la
guerre du Liban, l’instrumentalisation de l’islam par l’Occident, au
temps de la guerre froide, dans le but de contrer le nationalisme arabe,
idéologiquement proche de l’URSS, les injustices sociales criantes et
la perte de repères induite par la globalisation sont autant de facteurs
qui auront changé la donne.
C’est aujourd’hui l’appartenance religieuse qui
prime, non l’arabité. L’occupation de l’Irak par une puissance qui se
présente comme chrétienne suscite de fait un «choc des civilisations»
dont la ligne de faille atteint maintenant l’Égypte, et qui était
pourtant, des siècles durant, inconnu de l’islam et du christianisme
arabes.
Article publié sur Zaman France (14 janvier 2011).
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